Les saints de l’immobilier

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Ancienne statuette de saint Joseph trouvée par Zoe

Huguette Loubert a raconté une histoire fascinante dans le dernier numéro du Bulletin de la Société d’histoire du Plateau (vol. 16, no 3, automne 2021, p. 25) au sujet d’une fillette, Zoé Duquette 9 ans, qui a trouvé une statuette en plomb de saint Joseph enterrée devant sa maison familiale. Il appert qu’autrefois, il a été la coutume d’enterrer de telles statuettes devant la maison que l’on voulait vendre. De telles pratiques peuvent surprendre de nos jours, mais les saints de l’Église ne se voyaient-ils pas souvent attribués des pouvoirs quelconques? Saint Jude, par exemple, était le patron des causes désespérées.

Mme Loubert a établi avec raison que la statuette trouvée par Zoé représente saint Joseph bien qu’il ne soit pas doté des attributs traditionnels, soit un lys et une représentation de l’Enfant Jésus. Au contraire, d’une main, la statuette esquisse un geste de bénédiction alors que son autre main semble reposer sur un objet aujourd’hui manquant. Or, cette gestuelle reprend en partie celle d’une statue de saint Joseph réalisée en 1888 par le sculpteur québécois Olindo Gratton et son associé Philippe Laperle. Leur œuvre, sculptée sur bois, occupa la place d’honneur dans un oratoire érigé devant le Séminaire de Sainte-Thérèse de Blainville au Québec. Elle est conservée au Musée des métiers d’art du Québec. Tenant de sa main droite l’extrémité d’une tige de lys dont la partie supérieure a disparu, la statue de Gratton et Laperle s’appuie de sa main gauche sur l’embout du manche d’une hache, symbole du saint Joseph charpentier. Par cet attribut, l’œuvre, un ex-voto, reconnaissait l’aide de saint Joseph à la reconstruction du séminaire incendié en 1881 (photo 1). La statuette de Zoé devait donc comporter aussi une hache, l’attribut manquant.

La croyance en saint Joseph, en quelque sorte vendeur immobilier, persiste comme en attestent des publicités affichées sur le Web. « Saint Joseph, home seller » proclame ainsi une annonce. Des ensembles comprenant une statuette en plastique et le texte d’une prière que l’on peut adresser à saint Joseph, à cet effet, sont disponibles sur le marché (photo 2). Certaines publicités font état de témoignages de vendeurs satisfaits. Mais qui dit « vendre une maison » dit aussi « trouver une maison ». Et miracle! Le Web offre également des statuettes de saint Antoine de Padoue pour aider à dénicher la maison idéale (photo 3). N’est-ce pas que saint Antoine de Padoue était invoqué pour retrouver les objets perdus? Pourquoi, donc, ne pas l’invoquer pour trouver la bonne maison? Une maison non pas perdue mais recherchée?

On ne saurait, bien sûr, assurer la véracité de ces publicités. Au croyant de prendre ses chances. À noter, toutefois, que ces statuettes n’offrent aucune garantie en ce qui a trait au prix de vente et au prix d’achat. En désespoir de cause, on pourra toujours invoquer saint Jude (photo 4).

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Photo 1. Olindo Gratton et Philippe Laperle, « Saint Joseph charpentier », coll. Musée des métiers d’art du Québec; photo Giles Rivest.
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Photo 2. Ensemble « Saint Joseph home seller », modèle disponible sur le marché.
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Photo 3. Ensemble « St. Anthony home finder », modèle disponible sur le marché.
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Photo 4. « Saint Jude, patron des causes désespérées », modèle disponible sur le marché.

© Bernard Mulaire et Société d’histoire du Plateau Mont-Royal, 2021.

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